par Sébastien Lamy
publié le

Alsace-Lorraine : la débâcle vélo

Le chantier pour le passage du Fébus à l’intersection avec le Boulevard Alsace Lorraine prend fin, et la vraie stratégie de mobilité douce affichée par la mairie se traduit dans les faits par une vraie débâcle sur cette zone, qui reste très hostile au vélo. Reportage dans cet article, les propositions d’amélioration dans un autre billet . Nous nous concentrons sur les portions rénovées, même s’il y aurait beaucoup à dire sur le reste de ce boulevard.

Longer le boulevard Alsace-Lorraine 🔗︎

En allant vers l’ouest, vers la foire expo 🔗︎

Si on arrive sur le Boulevard Alsace Lorraine de l’est, côté clinique, pour aller tout droit vers l’ouest, côté foire expo…

Sous couvert de limitation à 30km/h, la voie vélo disparait pour faire apparaitre une voie voiture. Une “magie” très à la mode dans les années 1980 et qui conserve apparemment son succès à Pau en 2019.

Juste après on se retrouve sur un rond point double-voie. Rien de tel pour donner envie de circuler à vélo!

Mais le meilleur reste la sortie du rond-point: il faut s’insérer entre les deux voies voiture pour aller tout droit jusqu’au prochain rond-point ! Les débutants prenant la bonne résolution du déplacement à vélo apprécieront surement l’exercice. Au moins autant que ceux qui tenteront d’y accompagner leur enfant de 6 ou 7 ans à vélo (à cet âge là ça ne tient plus sur le siège enfant).

Les sigles vélos, qui ont été apposés récemment, ne changent pas le fond du problème. Bientôt ils ne feront que rappeler la mauvaise tenue des peintures et leur entretien erratique.

En allant vers l’est, vers la clinique 🔗︎

On commence par nous rapprocher des véhicules stationnés en supprimant la distance de sécurité protégeant des portières qui s’ouvrent.

la distance de sécurité ne réapparait pas le long des stationnements devant les restaurants, où on observe de nombreux arrêts minutes (donc autant d’ouverture de portières que de visiteurs-minute).

La bande n’est pas non plus protégée contre les acheteurs de pizza en voiture qui préfèrent souvent s’entasser sur la piste cyclable plutôt que penser à la solution vélo.

Débutants: n’oubliez pas de regarder derrière avant de vous engager sur la voie voiture pour contourner l’obstacle.

Franchir le boulevard Alsace-Lorraine 🔗︎

Les pistes cyclables réalisées au nord du Boulevard Alsace Lorraine à l’occasion des travaux pour le passage du Fébus donnent envie de se mettre au vélo. Aux heures de pointe, on peut y jouer à saute-bouchon avec plaisir. Tout le problème est d’accéder à ces pistes depuis le centre-ville, et inversement…

Pour sortir du centre ville 🔗︎

Quand on vient du centre-ville, si on ne veut pas se confronter aux rues rénovées sans aucun aménagement cyclable malgré un trafic conséquent, remonter la rue Carnot peut sembler une option intéressante. Mais comme Moïse, vous ne serez pas autorisé à fouler la terre promise !

Alors que le boulevard Alsace-Lorraine est en vue, un sens interdit “même pour les vélos” met fin à votre aventure. VOUS NE PASSEREZ PAS !

Pour venir au centre ville 🔗︎

Dans l’autre sens, alors qu’on profite des nouvelles pistes sur l’avenue Dufau, la dégradation de la cyclabilité est palpable à l’approche du boulevard Alsace-Lorraine: on commence par transformer la piste cyclable séparée en bande sur chaussée (trait de peinture).

puis une voie motorisée supplémentaire est rajoutée

Finalement, on débouche sur un rond-point double-voie dans lequel ont doit s’insérer, et où les voitures qui tournent à droite mordent la bande cyclable non protégée. Autant dire que le cycliste n’est pas en territoire conquis.

Pierre Grand a écrit un courrier à la mairie avec des photos pour faire part du manque de sécurité pour les cyclistes aux abords de ce rond point et réclamer un aménagement similaire à celui du boulevard Hauterive. Il a également envoyé une relance , et évoqué le sujet avec M. Brin.

En continuant tout droit sur Carnot, la piste cyclable longe des stationnements, coinçant les cyclistes au côté des ouvertures de portières.

Quelle stratégie ? 🔗︎

Rupture de bande et rond point double file, rupture d’itinéraire, passage à risque proche de stationnements, environnement provoquant le stationnement sur bande, circulation entre plusieurs files de voitures, autant de problèmes posés au vélo sur cette voirie toute neuve. Les stratèges de la mobilité douce ont de belles marges de progrès…

Notre maire répète souvent que le kilométrage de voies cyclables à Pau en fait la deuxième ville française derrière la Rochelle, pour les villes de taille similaire. Mais si la sécurité n’est pas au rendez-vous, la quantité ne sert à rien, et ces kilomètres de voies cyclables resteront autant de chemins ne menant nul part, à part au rejet du déplacement à vélo.

Frédéric Héran donne une analyse en lien avec notre constat :

Dans un premier temps, elles (les collectivités) se sont rendu compte qu’il ne suffit pas de réaliser des aménagements cyclables, encore convient-il que le réseau soit suffisamment dense et maillé, avec un niveau de sécurité homogène. Un effort de programmation se révèle indispensable à travers la mise au point d’un schéma directeur des itinéraires cyclables précisant les axes structurants et les aménagements prioritaires. Cela passe par le repérage et le traitement des discontinuités, dont on peut distinguer trois catégories selon l’échelle considérée :

  1. les petits obstacles gênants (une bordure trop haute, une plaque d’égout dangereuse, une chicane trop serrée, un revêtement défectueux…) ;
  2. les obstacles plus importants qui dissuadent déjà de circuler à vélo (un carrefour non aménagé, une bande cyclable envahie par du stationnement illicite, une artère sans aménagement cyclable, un sens interdit…) ;
  3. enfin, les coupures urbaines, telles que les infrastructures infranchissables ou les grandes emprises non traversables, qui interdisent tout passage d’un quartier à l’autre ou obligent le cycliste à de larges détours très décourageants.

En France, certaines villes n’en sont pas encore à traiter les micro-obstacles pendant que d’autres s’attaquent déjà aux obstacles plus importants. Rares sont celles qui, comme Strasbourg, ont une politique, assez coûteuse mais indispensable, de traitement systématique des coupures par des passages dénivelés.

Notre proposition 🔗︎

On en parle dans un autre billet

Note: la planche de BD a été prise sur ce blog les notes sont issus du baromètre des villes cyclables 2018